Mesure à un temps
Marlène. Je me souviens d’elle comme d’un
rêve.
Un brouillamini de sons de formes et de
parfums.
Des yeux sombres et profonds, des cheveux bruns
bouclés en clé de Sol.
Des doigts fins agiles rapides sur les noires
et les blanches.
La première fois, je ne l’ai pas vue, elle.
De la fenêtre entendait ses gammes.
Ensuite sur le fond jaune sa silhouette noire
comme une amphore,
L’incandescence d’une cigarette entre ses
doigts.
Je l’aimai dès la première note.
Dès la première envolée de fumée noire.
Si mineur fût-il cet amour m’accroche comme
une croche à la partition.
Chaque soir me postait devant l’immeuble, la
fenêtre crachant sa jaunâtre chaleur,
Tuant le néon rose d’un sex shop pas
fameux.
Chaque soir Chopin, Mozart ou Beethoven
s’invitaient dans sa loge fumeuse ;
Parfois un quidam troublait sa gamme, et dedans
le bruit d’ébats entêtants.
Un soir Quidam cria Marlène, d’en bas
chialant qu’elle était celle…
Je n’ai pas gardé la suite, « Marlène »
tonnant comme l’apothéose d’un requiem.
Sans comprendre comment ni pourquoi, à deux
pas elle était là,
Criant d’un lyrisme touchant « casses-toi
connard ».
Son regard me croisa me cloua « toi aussi
casses-toi ».
Et sans savoir comment ni pourquoi, une folle
nuit entre ses draps.
Fauré me figea dans sa Pavane.
Comme une note elle s’enfuit s’envole
distante et reviens dans une mesure à trois temps.
Le matin somnolent, Quidam hurlant, porte
fracassant, Marlène sur Satie expirant.
Quidam sur moi levant une dernière note dans
ma mesure à un temps,
Quidam sur moi trophée sanguinolent abattant.
Ma vie défilant, pensait l’amour est une
imperfection dans la vie-mesure à un temps.
Juillet 2010.
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